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Un peu d'histoire... Zéphyr N°28

L’aventure Fouga et le CM 170 Magister


L’aventure débute en 1935 quand un certain Monsieur Fouga, directeur d’une usine d'éléments de matériel ferroviaire, rachète une entreprise de construction aéronautique, les avions Bernard. Pour relancer la Société, il engage Pierre Mauboussin, ingénieur aéronautique de son état. Association faite, ils s’installent dans les Landes, à Aire sur l'Adour. Pierre Mauboussin recrute J. Castello, et la Société se spécialise dans l’étude et la construction de planeurs, tout en travaillant pour les bureaux d’études de grands constructeurs dont Emile Dewoitine.
En 1949, l’usine Air-Fouga possède dans ses cartons un curieux petit planeur désigné CM 8. Une des particularités de ce planeur à aile médiane réside dans l’architecture de son empennage en V, poétiquement appelé "papillon". Avec Joseph Szydlowski, concepteur d’un petit réacteur léger, ils imaginent de motoriser le CM 8. Le 14 juillet 1949 décolle un curieux planeur équipé d’un réacteur. Le «Cyclone » vient de naître. Pour la petite histoire, l’appellation "Cyclone" sera changée, à la demande du motoriste américain Wright qui fabriquait un moteur du même nom, en "Sylphe".

Les prototypes se succèdent (le 31 août le CM 8 R9 "Cyclope" équipé d’un réacteur "Piménée" de 110 kgp) et lors du Salon International du Bourget de 1951 la société présente le CM 82R équipé de deux réacteurs "Palas" et de roquettes sous les ailes. Le CM 82 1R, avion d’entraînement biréacteur, reste lui aussi sans suite. Pour tester de nouveaux réacteurs, les ingénieurs imaginent un curieux assemblage de deux fuselages de "Cyclope". Lors des essais du "Marboré II", ils installent le réacteur sur le plan central reliant les deux fuselages du "Gémeaux".

Pendant ce temps, Mauboussin et Castello se lancent dans l’étude d’un nouvel avion d’entraînement biréacteur destiné à l’Armée de l’Air, le CM 170 "Magister". La silhouette très particulière du “Magister” (du latin signifiant maître) est bien celle du petit planeur monoplace CM 8 de 1949. Destiné à l’apprentissage des futurs pilotes militaires, le "Magister" est un biréacteur de construction métallique, monoplan à aile médiane et empennage ‘’papillon’’. La finalité même du CM 170 est de fournir à l’Armée de l’Air un avion d’entraînement se rapprochant le plus possible des appareils opérationnels. Pour ce faire, une large palette de missions doit être réalisable avec l’avion, voltige, vol sans visibilité, vol de nuit, entraînement à l’utilisation d’armes avec emport de deux mitrailleuses, de bombes ou de roquettes. Le moniteur-instructeur trouve tout naturellement sa place derrière l’élève et sa visibilité vers l’avant est améliorée à l’aide d’un périscope. Le 23 juillet 1952, le pilote Léon Bourrieau fait décoller le premier Fouga CM 170R de la piste de Mont-de-Marsan. Bientôt l’Armée de l’Air passe commande du ‘’Magister’’. Le premier avion de série quitte les usines le 20 février 1956. La première école à recevoir ses Fouga, le 28 mai 1956, est Salon-de-Provence. Les avions sont affectés aux différentes formations d’entraînement, ainsi qu’aux escadres pour servir d’avion de servitude et de liaison.

Peu puissant, avec deux mini-turboréacteurs français Turboméca "Marboré" de 400 à 480 kg de poussée, le “Magister” n’en est pas moins rapide (+ 600 km/h). C’est également un voltigeur magnifique. La Patrouille de France remplace ses Mystère IV par les ‘’Magister’’ en 1964. Les neufs avions volent avec pour seules modifications le remplacement d’un cadre supportant la voilure par un modèle forgé, de façon à supporter les contraintes répétitives, l’installation de fumigènes et d’une ceinture ventrale, dite ‘’G négatifs’’, accrochée au plancher. La modification la plus remarquable sur les avions de série est l’introduction du réacteur ‘’Marboré VI’’, plus puissant, à partir du numéro 436.

L’autre succès du ‘’Magister’’ fut l’exportation. En effet, près de 18 pays utilisèrent ou construirent sous licence le petit biréacteur Fouga : Allemagne, Belgique, Israël, Finlande, Autriche, Irlande, Algérie, Cameroun, Libye, Liban, Maroc, Togo, Ouganda, Salvador, Guatemala, Brésil, Bangladesh et la République Khmer.
Forte de cette réussite, la Société Fouga développa plusieurs ‘’suites’’ à son ‘’Magister’’ : Le CM 171 ‘’Makalu’’ (version supersonique du ‘’Magister’’). CM 173 ‘’Super Magister’’ (équipé de sièges éjectables). CM 191 (quadriplace franco germanique) et le Fouga 90. Celui-ci fut donné comme le successeur du ‘’Magister’’, l’Armée de l’Air lui préféra définitivement l’Alpha Jet à la fin des années 70.

FOUGA CM 170 Magister

CM 175 Zéphyr et le numéro 28

Le Zéphyr tire ses racines du Fouga CM 170 Magister. La Marine recherche alors un avion école adapté aux contraintes de l’utilisation sur porte-avions. Tout naturellement les choses vont s'enchaîner !

Potez-Fouga propose alors une version modifiée de son Magister, le CM 170M. Le « M » signifiant logiquement Marine !
En apparence très semblable à son aîné, il s’en distingue cependant par des transformations importantes :

Autres différences notables : les deux réacteurs Marboré II, moins puissants que la version « VI » des Magister, cousins de l'Armée de l'Air !
Le Marboré est un turboréacteur, produit par Turbomeca. Le Marboré II, qui produit une poussée de 3,9 kN à 22 600 tr/min est équipé d'un compresseur centrifuge monocorps, dont la consommation de carburant s'établit à 412,6 l/h.

Reconnaissable entre tous par son bruit de fonctionnement, hautement perché, il propulse les tympans dans les limbes de la surdité précoce les inconscients qui ne prennent pas un minimum de précautions (ou des boules Quies !).

Ces différences notables amènent une dernière adaptation : l’avion, originellement nommé "Esquif" (pour des raisons qu'on imagine très bien...) prend le nom de CM 175 Zéphyr !

Il est vrai que ce nom venteux est plus en cohérence avec les dénominations des appareils de la Marine à cette époque (Aquilon, Alizé...).

C'est donc le Zéphyr que la Marine commande... à 30 exemplaires initiaux, la livraison s’échelonnant entre 1959 et 1961.

C’est sur l’Arromanches et les nouveaux porte-avions Foch et Clémenceau que le Zéphyr fit la majorité de sa carrière, démontrant ses capacités de fiabilité et de robustesse dans des conditions sévères. Le Zéphyr reste l’avion qui forma plusieurs générations de pilotes de l’Aéronautique Navale, entrant de plain-pied dans la légende des "Marins du Ciel".

D’une légende naissent souvent d’autres légendes, et Ramon Josa qui fit une carrière d’exception dans la Marine est là pour le prouver. Lui qui présenta pendant ses années civiles le "Zéphyr 28" , évoque le choix de la décoration qu’il porte encore aujourd’hui :

« Je l’ai choisie d’abord parce qu’elle est très belle, mais aussi sentimentalement parce que le pilote qui l’a imaginée est quelqu’un à qui je voue une grande reconnaissance : c’est lui qui m’a guidé et conseillé en 1956 pour changer de spécialité, et de mécanicien chaufferie devenir pilote.
En 1961 les CM 175 étaient à la 59S commandée par le LV Lefèvre, c’étaient des avions neufs et le "Pacha" a souhaité les utiliser pour le rayonnement de l’Aviation Embarquée en constituant avec ses pilotes instructeurs une patrouille de voltige.

Assez rapidement, le « Pacha » a demandé à son équipe d’imaginer une robe plus spectaculaire que le discret « argenté ». C’est Michel Cousyn qui a eu l’idée de celle-ci, particulièrement réussie. Le loup noir rappelle une des missions de la 59S à l’époque, la chasse de nuit d’abord sur F6F puis sur Aquilon. »

"Zéphyr 28"  est toujours là, unique exemplaire opérationnel au monde, prêt.
Une légende est née... Nous concernant, elle porte le numéro... 28 !

Fouga CM 175 Zéphyr